A la suite du meurtre de son père, le jeune Faïel est chassé de sa ville natale. Avec sa mère et sa petite soeur, ils abandonnent leurs biens et s’enfuient, dans la hâte, à la recherche d’une nouvelle terre d’accueil. Le roman raconte l’histoire de leur quête. A la suite du meurtre imprévisible de son père, le jeune Faïel est chassé de sa ville natale. Avec sa mère Sisine et sa petite soeur Nénelle, tous trois devenus étrangers, ils abandonnent leurs biens et s’enfuient, dans la hâte, à la recherche d’une nouvelle terre d’accueil.
Le roman est l’histoire de cette quête, mais aussi de ceux que leur vie va croiser. Et c’est une grande histoire, pleine de mystères, envoûtante et âpre. Un récit où les êtres aiment, chantent et se taisent, où les langues et les mémoires s’affrontent. Une fable où les montagnes, les arbres et les oiseaux se font les gardiens de secrets anciens, tandis que des femmes veillent et oeuvrent sans cesse dans l’espoir de sauver l’humanité.
Faïel est une caverne littéraire d’Ali Baba aux multiples Sésames. Il y a d’abord cette immersion totale et immédiate, façon Garcia Marquez ou Sepulveda, dans un monde inconnu vu à travers les yeux d’un enfant qui découvre son père mort sur la table de la salle-à-manger, un monde où le surnaturel se glisse d’abord avec discrétion, se contentant de faire fondre à demi une grille en fer forgé pour commencer. Il y a la lecture des rapports humains intra-familiaux et sociaux : entre ceux qui sont d’ici de toute éternité et les migrants pacifiques qu’ils exploitent et rejettent ou les envahisseurs colonisateurs avec lesquels certains collaborent servilement, d’autres font le gros dos, d’autres encore s’organisant en résistance. Il y a l’approche des mystères de la nature avec ses barbes d’abeilles, ses loups sauveteurs d’enfants, ses grands débats d’oiseaux diurnes, ses conclaves d’oiseaux nocturnes, ses jeunes plants d’olivier qui prennent 300 ans en une nuit, ces planteurs de forêt qui font penser à Giono et à son dieu Pan qui arpente les chênaies. Et puis, partant de Zazie et de son métro invisible, en suivant Queneau et l’OULIPO on parvient à Calvino, à son baron perché et à ses villes invisibles dont la ville cachée n° 3 qui contient deux villes : celle du rat et celle de l’hirondelle. Il ne reste plus qu’à apprendre aux rats à chanter l’hymne national des envahisseurs pendant qu’une hirondelle étend sa paternité sur une résistante enterrée vive. Et puis il y a une lecture sonore : des sons cosmiques qui tuent les rats et paralysent les humains, des sons mères que chantent des moines bâtisseurs, qui font renaître l’enterrée vive, et le mantra d’une langue inconnue qui, dans la bouche de la petite sœur et par la voix de sa mère, défenestre les moines sourciers et menace de tout emporter. Il y aurait aussi la lecture des noms travestis par l’enfant, dont le sien propre : Faïel, les failles de l’archange guérisseur. Cette caverne aux nombreux recoins est inépuisable. Et les échos que je viens de noter avec d’autres grandes œuvres littéraires ne prouvent qu’une chose : ce roman Faïel si luxuriant s’est abreuvé aux mêmes sources profondes d’inspiration que certains de ses grands prédécesseurs. Il recèle un nombre d'étoiles bien supérieur aux cinq que m'autorise à décerner Alphalire.