« Crise de la fécondité. De plus en plus de couples stériles. De moins en moins de garçons. Délétion du gène Y. Infertilité masculine. Et pour les couples qui y arrivaient, huit enfants sur dix étaient des filles, et trois sur cinq naissaient avec le syndrome de l’X fragile. »
France, quelques dizaines d’années dans le futur. Le pays est dirigé par l’extrême droite, sur fond d’effondrement de la fertilité et de recrudescence de naissances touchées par le syndrome de l’X fragile. Grâce à la position de son mari au sein d’un cabinet ministériel, Typhaine – qui a déjà une fille lourdement handicapée – fait partie de la première vague de femmes sélectionnées pour avoir accès au Programme de génoembryologie. Enceinte d’un garçon sain, sa grossesse est étroitement surveillée par le gouvernement et le sera durant les premières années de la vie de Nolan, dont la progression cognitive est aussi impressionnante qu’inquiétante. Elle qui rêvait de contribuer activement au retour de la démocratie, qu’a-t-elle abdiqué de ses idéaux pour en arriver là ? « Nous étions mille cinq cents. La première fournée. Les mères pondeuses du futur de la Nation. L’espoir non pas d’une civilisation mourante, mais d’un régime fascistoïde qui a réussi à développer un programme de fertilisation eugéniste dans la droite lignée de ce dont auraient rêvé, un siècle et demi plus tôt, les médecins sorciers nazis. »
Explorant les thèmes du corps et de la société de contrôle, le premier roman de Nicolas Martin est à la fois une œuvre littéraire sensible autour de la parentalité et un thriller technologique captivant.
La maison d'édition :
Créées à l’aube de l’an 2000 en Camargue gardoise, sur un modèle éditorial et une curiosité inspirés par Paul Ochakovski-Laurens, les éditions Au diable vauvert ont d’abord pour ambition de désenclaver les genres et faire reconnaître de nouvelles voix d’écrivains émergeant des pop-cultures, alors tout juste publiés en poche, comme Gaiman, Ayerdhal, Bordage,…
Dystopie effrayante qui s’intègre bien dans la brèche littéraire ouverte par Margaret Atwood et sa Servante écarlate. En France, dans quelques décennies. L’extrême-droite est bien installée au pouvoir, la fertilité est au plus bas, les enfants sont génétiquement modifiés, les migrants sont parqués, les déviants éliminés… La médecine, au service du réarmement démographique devenu vital, perd toute éthique. Les femmes ne sont plus que des ovaires et les bébés des sujets de laboratoire. L’auteur, journaliste scientifique de radio, maitrise parfaitement son sujet et la réflexion politique est pertinente. Lecture éprouvante qui ne peut laisser indemne…
Dystopie, écrite comme un scénario (cf. : la Servante écarlate). Roman qui change, qui se place comme un signal d'alerte sur nos sociétés et les problèmes de démographie, les craintes autour de l'IA, les déplacements migratoires dus aux bouleversements climatiques, mais aussi politiques. J'ai eu envie d'enchainer les chapitres, j'imaginais plusieurs fins possibles, …
bravo
« Félicitations, c’est un garçon ! Et merde… sont les premiers mots qui viennent à l’esprit de Typhaine » Typhaine, voix de ce roman, vit dans une France gouvernée par un parti totalitaire, une société « techno-cocon autoritaire, individualiste, dans lequel plus personne ne bougeait de peur de perdre le confort acquis, où la solidarité n’était qu’un vieux souvenir, et où la vie avait cédé la place à la survie et à la peur de l’autre ». Un gouvernement qui s’inquiète de la crise de la fécondité que traverse le pays, au point de rendre l’avortement quasi illégal. De plus en plus de couples sont stériles. Pour les autres, ils mettent au monde 8 fois sur 10 des filles et trois sur cinq naissent avec le syndrome de l’X fragile, qui provoque des retards conséquents de développement chez l’enfant. Alors, lorsque Typhaine rejoint, à 37 ans, grâce à la position sociale de son mari Gauthier et après avoir eu Madeleine, sa fille « Fragile », le programme expérimental de génoembryoligie initié par le Gouvernement, dont seules 1.500 femmes y sont éligibles, c’est sa chance d’enfanter un enfant « sain » : Nolan sera le fruit de cette grossesse, issu de l’ingénierie génétique et d’une fécondation in vitro. La naissance de ce petit garçon aux facultés cognitives inquiétantes va radicalement bouleverser la vie de Typhaine et de sa famille et bien au-delà de la nation. Une dystopie engagé, un page Turner brillamment menée, aux sujets multiples : parentalité, eugénisme, manipulations génétiques, dérives totalitaires. J’ai tout particulièrement aimé les deux personnages féminins de Typhaine et d’Elisa, sa meilleure amie, tout aussi forts que combattants. La mise en page enfin accentue habillement le ressenti de lecture. Un roman qui fait froid dans le dos