Fuir leur petite ville du Midi, ses lotissements, son quotidien morne : Jo et Céline, deux soeurs de quinze et seize ans, errent entre fêtes foraines, centres commerciaux et descentes nocturnes dans les piscines des villas cossues de la région. Trop jeunes pour renoncer à leurs rêves et suivre le chemin des parents qui triment pour payer les traites de leur pavillon. Mais, le temps d’un été, Céline se retrouve au coeur d’un drame qui fait voler en éclats la famille et libère la rage sourde d’un père impatient d’en découdre avec le premier venu, surtout s’il n’est pas « comme eux ».
L’été circulaire est un roman âpre et sombre, portrait implacable des « petits Blancs », ces communautés périurbaines renfermées sur elles-mêmes et apeurées. L’écriture acérée, la narration tendue imposent d’emblée le talent de Marion Brunet.
La maison d'édition :
Fondées en 1900, les éditions Albin Michel portent toujours le nom de leur fondateur dont Francis Esménard, l’actuel président-directeur général, est le descendant. Depuis plus de cent ans, cette grande maison d’édition indépendante a contribué avec succès à faire connaître ou reconnaître de nombreux écrivains.
J'ai beaucoup aimé le style de Marion Brunet qui va à l'essentiel, ses dialogues percutants qui sonnent justes, son talent pour évoquer chaque personnage d'une petite touche douce, pastel, ou d'un coup de griffe acérée, son humour noir sous-jacent. Jo et Céline, ses personnages principaux nous font penser aux garçons du roman "Fief" de David Lopez. Mais dans l'univers des filles, peu d'éclats de rire, des situations sombres, désespérées. J'ai particulièrement aimé le dernier chapitre que l'on peut mettre en parallèle avec le premier, très violent. Ambigu, il nous questionne : la vie continue ! Circulez ! Il n'y a rien à voir ! Ou bien, quelque chose a changé... grâce à la petite Jolène, au prénom si bien choisi !
« L’été circulaire » : roman formidable qui décrypte les ressorts du déterminisme social au sein d’une famille du sud de la France, le temps d’un été où la vie tourne en boucle. Son héroïne, c’est Céline, bimbo de 16 ans qui se retrouve enceinte d’un homme dont elle refuse de donner le nom. A la maison, le quotidien du père, c’est bière et pastis avec son ami Patrick, et torgnoles à l’occasion, pendant que la mère s’abrutit devant les séries télé. Avec sa sœur Jo, Céline « rouille » et traîne tout l’été le mystère du géniteur de son enfant, mystère finalement levé pour le lecteur. Sur fond de chômage, de racisme ordinaire, de désespérance, de départ en Syrie, le récit fait résonner d’autres histoires de familles abîmées, de Dupont Lajoie à Gervaise Coupeau. Mais il s’agit de la France de 2018. A lire de toute urgence !
Un portrait très crédible de la société dite « périphérique » : une petite ville du Vaucluse entre Cavaillon et l’Isle sur la Sorgue, une famille aux fins de mois difficiles, 2 adolescentes nées trop tôt, un couple qui s’ennuie et ne s’aime plus. Ce qui est remarquable dans ce roman c’est le réalisme qui se dégage sur la description du milieu visé. Une description acérée, véritable satire sociale d’un monde « à côté » qui se délite car il a perdu tous ses rêves.