« Dans le noir, la monstre fait même peur aux loups enragés sous mon lit sauf que je ne peux pas m’enfuir de ma peau. Je veux que quelqu’un la tue mais personne ne la voit. Je veux qu’elle meure mais je ne sais pas comment elle s’appelle. Je cherche son nom partout. »
La folie qui parcourt ce roman électrise par sa brutale justesse et la sauvagerie poétique de son regard sur le monde.
La maison d'édition :
Les Éditions Verticales, créées par Bernard Wallet en 1997 (rejoint par Yves Pagès l’année suivante, puis par Jeanne Guyon en 2000), intègrent le groupe Gallimard en 2005 après avoir quitté les Éditions du Seuil. Elles se présentent comme un «centre de ralliement des divergences», se concentrant essentiellement sur la fiction…
Roman à la forme originale, drôle et intelligent. Insatisfaite du langage usuel des adultes, le personnage que l’on suit de ses 3 à ses 27 ans invente un nouveau langage pour nommer le réel qui l’entoure et se sauver des violences éducatives ordinaires infligées par sa mère (institutrice) alors qu’elle était enfant. On est emporté dans une tempête langagière d’un bout à l’autre du roman. Léna Ghar use d’une grande virtuosité lexicale, syntaxique et narrative ( l’intégration totale des paroles rapportées dans la narration par exemple) pour rendre compte de ce cheminement. À l’âge adulte, elle tente même d’élucider le réel par les équations mathématiques. L’humour constant permet de prendre de la distance vis à vis des faits sans nuire à la profondeur du roman qui est avant tout une réflexion sur les limites du langage mais aussi sur la famille, les normes sociales, bref la vie. Ajoutons que le personnage principal est touchant et que les personnages secondaires ont de l’épaisseur. Léna Ghar fait une véritable proposition littéraire novatrice. Auteure à suivre.
OVNI étonnant. Ce texte est un jeu permanent avec la langue. La narratrice s’est créée un langage très imagé pour échapper à la violence verbale de sa mère et aux silences perturbants de son père. Par exemple : elle vit dans la praison, forme contractée de maison-prison-poison. On peut perdre pied par moments, mais c’est assez facile de raccrocher. Lecture exigeante. Promesse littéraire évidente.
Depuis l’âge de 3 ans (elle en a 27), un monstre s’est emparé d’elle, elle se sent dévorée de l’intérieur par quelque chose qui n’a pas de nom ; elle cherche impérativement à nommer le mal qui la ronge dans la gorge et qui l’empêche de dormir. Des chapitres très courts (2-3 pages), cloisonnés comme son vécu. Écrit à la 1ère personne, l’invention de mots (praison = maison...) et le détournement du sens des mots ( les paladins, les spartiates…) m’ont paru dans un premier temps plus une régression qu’une recherche de libération de la personne. Et l’orthographe dans les titres « Tumeur ou tutu », « démon tronc », « infemme », des signes de déraison ? L’obsession entrave la liberté et les mathématiques dont elle est férue ne résolvent pas l’équation. Et le cri de la souffrance devient un chant, la déraison création.Le texte entraîne de la perplexité à la réflexion que l’oralité fait mieux comprendre ; il y a de très belles pages : la fabrication d’un oxymore, son premier orgasme. Surprise face à cette innovation littéraire. À lire absolument.
Nous sommes rapidement séduits par ce langage qui traduit à lui seul la folie par ses mots inventés. Mais on reste sur sa faim, le roman paraît inachevé, d'où vient et où va cette folie ?
Bien écrit et intéressant, mais un peu lassant dans sa succession de chapitres courts.